Sanctions sur les diamants russes : bonnes ou mauvaises pour l’Afrique ?

Sanctions sur les diamants russes : bonnes ou mauvaises pour l’Afrique ?

Au début de l’année, le G7 (le groupe des nations les plus riches du monde, composé des États-Unis, du Canada, du Royaume-Uni, de l’Allemagne, de la France, de l’Italie, du Japon et de l’Union européenne) a interdit l’achat de diamants bruts extraits de Russie.

Cette interdiction fait partie de l’ensemble des sanctions imposées à la Russie par les pays occidentaux et leurs alliés à la suite de l’invasion de l’Ukraine par le président Vladimir Poutine en 2022.

Mais les sanctions contre les diamants russes, visant à affaiblir l’économie russe en raison de l’invasion, pourraient menacer la stabilité du marché mondial du diamant, selon M’Zee Fula Ngenge, président du Conseil africain du diamant (ADC).

« Quand on regarde la proposition du G7, qui affecte l’industrie mondiale du diamant, il faut tenir compte du fait que l’Afrique domine collectivement la production », dit Fula Ngenge à DW.

Le Botswana prend la place de la Russie

Avant l’interdiction, la Russie était le plus grand producteur de diamants au monde.

« Ce qui est bon pour l’un est mauvais pour l’autre. Nous ne sommes pas contre la Russie », déclare Ngenge, « mais le fait que ce pays soit soumis à des sanctions place le Botswana au premier rang ».

Selon Fula Ngenge, un autre pays africain pourrait même rejoindre le groupe des neuf plus grands producteurs de diamants.

« Maintenant, la plupart des pays qui achètent des diamants comptent sur nous », explique Ngenge, ajoutant que c’est une opportunité pour le continent de sortir de l’ombre dans ce secteur.

« Le G7 aurait dû nous consulter »

Toutefois, les producteurs de diamants africains affirment que les pays du G7 auraient dû les consulter avant d’interdire les diamants russes.

Parmi les pays du G7, seul le Canada produit des diamants.

« Ils (le G7) nous ont complètement laissés en dehors de la discussion, considérant que nous sommes les leaders mondiaux (dans la production de diamants). Ils auraient dû nous consulter d’abord », souligne Fula Ngenge.

De plus, le G7 exige que les pays africains envoient leurs diamants à Anvers, en Belgique, pour certification. Anvers est considérée comme le centre névralgique de l’industrie du diamant.

Le Botswana critique cette exigence, arguant qu’elle crée des obstacles dans la chaîne d’approvisionnement. Le président du pays, Mokgweetsi Masisi, devrait rencontrer le 21 juin le chancelier allemand Olaf Scholz pour discuter du processus de certification.

Le processus de Kimberley

Les diamants extraits en Afrique sont déjà soumis au processus de Kimberley, pour empêcher les « diamants du sang », extraits dans les zones de conflit, d’atteindre le marché.

« Tout pousser à Anvers est un pas en arrière », commente Fula Ngenge, soulignant que les producteurs de diamants africains adhèrent strictement à la certification du Processus de Kimberley.

« Nous avons passé les deux dernières années à essayer de trouver un moyen de nous débarrasser des diamants russes alors qu’il n’y a pas eu suffisamment d’efforts pour arrêter la guerre (en Ukraine). »

La Russie dans le secteur du diamant en Angola

La Russie détient une participation de 41 % dans la principale mine de diamants d’Angola, Catoca. Fula Ngenge note que la mine est désormais sous pression en raison des sanctions contre les diamants russes.

L’African Diamond Council (ADC) a déclaré qu’il envisageait de supprimer la Russie parce qu’elle « ne veut pas être associée à quoi que ce soit de négatif qui pourrait potentiellement affecter les diamants extraits dans le pays sans lien avec la Fédération de Russie ».

L’interdiction des diamants russes par le G7 a donné aux pays africains un rôle plus important dans le commerce mondial des diamants.

« Mon travail consiste à convaincre (le reste du monde) que nous sommes suffisamment puissants et influents pour intervenir et enseigner à certains des principaux centres diamantaires comment faire des affaires. »