L’Union européenne (UE) fournira à l’Égypte un plan de financement de 7,4 milliards d’euros (environ 8,06 milliards de dollars) entre 2024 et 2027, comme l’a annoncé la Commission européenne ce dimanche (17.03).
Ce financement est destiné à aider le pays à stabiliser son économie tout en réduisant sa dépendance au gaz russe. Il comprend une subvention pour aider à faire face au flux de migrants de la région vers l’Europe.
L’accord prévoit le financement de 5 milliards d’euros d’assistance macrofinancière, de 1,8 milliard d’euros d’investissements directs et de 600 millions d’euros de subventions sur trois ans pour soutenir l’économie égyptienne chancelante.
Victoria Rietig, responsable du programme migration au Conseil allemand des affaires étrangères, souligne que cet accord n’a rien de très innovant.
« D’un point de vue européen, la coopération avec l’Égypte dans le domaine du contrôle migratoire est une plus grande réussite que celle d’autres pays. Le régime égyptien est en mesure d’utiliser des contrôles beaucoup plus stricts pour garantir que le nombre de bateaux quittant l’Égypte est très faible », a-t-il commenté dans une courte interview avec DW.
L’importance stratégique de l’Egypte
L’accord élève la relation de l’UE avec l’Égypte au rang de « partenariat stratégique » qui vise à renforcer la coopération dans les domaines des énergies renouvelables, du commerce et de la sécurité.
« Avec le poids politique et économique de l’Egypte, et sa situation stratégique dans une zone géographique très problématique, l’importance de nos relations va croître avec le temps », a écrit la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, sur X, anciennement Twitter.
Von der Leyen dirigeait une délégation de plusieurs dirigeants européens qui ont rencontré le président Abdel Fattah al-Sissi au Caire ce week-end. Le bureau d’al-Sissi a déclaré dans un communiqué que l’accord vise à réaliser « un pas significatif dans la coopération et la coordination entre les deux parties » afin de « réaliser des intérêts communs ».
L’économie égyptienne, axée sur des mégaprojets d’infrastructures très coûteux, a été durement touchée par les récents chocs économiques mondiaux.
Le pays subit également des pressions politiques et économiques en raison de l’incursion israélienne à Gaza. Les effets secondaires de la guerre frappent d’importantes sources de revenus égyptiennes, comme le tourisme et le transport maritime via le canal de Suez.
Plus tôt ce mois-ci, le Fonds monétaire international (FMI) a accordé un prêt de 8 milliards de dollars (un peu plus de 7,3 millions d’euros) à l’Égypte. Cette aide faisait suite à l’annonce selon laquelle les Émirats arabes unis investiraient 32 milliards d’euros dans l’économie égyptienne à travers un projet de construction à Ras al-Hikma, une péninsule méditerranéenne proche de la ville d’Alexandrie.
L’UE préoccupée par les flux migratoires
Les gouvernements européens s’inquiètent depuis longtemps du risque d’instabilité en Égypte, où l’adversité économique a conduit un nombre croissant de personnes à émigrer.
En outre, le pays compte 9 millions de migrants et de réfugiés, selon les données de l’Organisation internationale pour les migrations des Nations Unies.
Anthony Dworkin, chercheur politique principal au Conseil européen des relations étrangères (ECFR), affirme que les États européens devraient pousser l’Égypte vers le progrès.
« La situation des droits de l’homme en Égypte est extrêmement problématique et préoccupante », a-t-il commenté. « Je pense que la grande question est de savoir si l’accord contient des critères contraignants pour gérer la crise migratoire et en même temps résoudre les problèmes économiques de l’Égypte. C’est vraiment un accord dans lequel il n’y a rien de nouveau, mais il reconnaît que l’Égypte a un rôle important à jouer. dans ce domaine, et constitue un soutien en ce sens », a-t-il ajouté.
Selon un haut responsable de la Commission européenne, cet accord avec l’UE comprend des mesures sur « la sécurité, la coopération antiterroriste et la protection des frontières, en particulier celle du sud » avec le Soudan.
Cet accord fait suite à d’autres accords controversés conclus par l’UE en Afrique du Nord, notamment avec la Libye, la Tunisie et la Mauritanie, pour endiguer le flux de migrants irréguliers.
La Première ministre italienne Giorgia Meloni et le Premier ministre grec Kyriakos Mitsotakis, dont les pays sont des États de première ligne qui accueillent la grande majorité des migrants vers l’Europe, ont rejoint Von Der Leyen lors de son voyage au Caire.
Le gouvernement grec est particulièrement préoccupé par l’augmentation des arrivées de migrants d’origine égyptienne.
L’Agence des Nations Unies pour les réfugiés a enregistré plus de 1 000 personnes arrivées sur l’île la plus méridionale de la Grèce, Gavdos, et sur la Crète voisine, via une nouvelle route de réfugiés depuis Tobrouk, en Libye.
L’ONG Human Rights Watch, basée aux États-Unis, a critiqué ce qu’elle appelle « l’approche de contrôle des migrations contre de l’argent » de l’UE, qui, selon elle, « donne du pouvoir aux dirigeants autoritaires tout en trahissant les défenseurs des droits humains, les journalistes, les avocats et les militants dont le travail implique de grands risques personnels ».